dimanche 20 mars 2011

Cantonales : quelle portée donner aux résultats ?

Aujourd'hui environ la moitié des français inscrits sur les listes électorales devront aller voter pour choisir leur conseiller général.

A quoi sert cet élu dont on entend assez peu parler ? En tant que conseiller, il siège (ou devrait siéger, l'abstention étant parfois assez élevée chez les élus) au conseil général. Ils s'y occupent alors des départements, mais ont également des rôles plus importants, notamment pour la désignation des sénateurs, ou pour participer à des processus de décision à plus grande échelle, à l'exemple de leur participation dans le STIF en Ile-de-France, organisme cochargé de l'organisation des transports.

Les résultats de cette élection, qui s'achèvera dans huit jours après le second tour, seront amplement analysés, commentés, disséqués par tous les journalistes et les hommes politiques. Et comme toujours, le sens à donner aux résultats variera selon les formations politiques. C'est toujours comme ça, et c'est tellement prévisible que je peux déjà jouer le rôle du politique de base interviewé sur une matinale du lundi matin. N'étant ni expert en sondages, ni voyant, je dois donc distinguer plusieurs cas :
  • 1er cas : la droite gagne un ou plusieurs départements : l'UMP criera alors à la victoire, en ne manquant pas de souligner leur modestie apparente et leur volonté de mener à bien la politique du gouvernement. On aura alors droit à des "c'est la preuve que les français voient que la gauche ne propose rien alors que Nicolas Sarkozy travaille pour résoudre la pire crise depuis la Rome antique". La gauche, elle, relativisera la portée des résultats, en soulignant le caractère local de l'élection. Alors même que les ténors de l'opposition présidentielle n'ont pas manqué d'appeler à un vote sanction contre la droite.
  • 2ème cas : la gauche gagne un ou plusieurs départements : on reprend le scénario précédent, en sens inverse. On pourrait même ajouter une déclaration de François Fillon sur TF1 pour dire que le gouvernement a entendu les inquiétudes des français mais qu'ils doivent attendre que les effets des réformes gouvernementales se montrent.
A cela, on doit ajouter les variantes des partis plus petits :
  • 1ère variante : le Front National : s'il ne gagne aucun canton, il ne manquera pas de dire qu'il ne s'agissait que de la première étape avant 2012, en soulignant ses scores élevés. S'il en gagne, ce sera le bonheur suprême pour tous les nationaux, signe que les français rejettent l'UMPS.
  • 2ème variante : Europe Écologie Les Verts : au plus bas dans les sondages, ils pourraient bénéficier du débat sur le nucléaire. Cependant, leur stratégie d'alliance ou non avec les socialistes et les communistes est parfois difficilement compréhensible par les électeurs, qui pourraient le montrer. En tout cas, ils voudront peser plus par la suite dans leur alliance avec la gauche.
  • 3ème variante : l'extrême gauche et le Parti de Gauche : ils vont sans doute faire mieux qu'aux dernières élections, et on entendra Jean-Luc Melenchon clamer que le peuple l'a choisi.
Ce qui est sûr, c'est que tous les politiques vont parler au nom des français, et sans doute à leur place. A mon goût, c'est une mauvaise habitude que certains devraient très vite perdre : il n'y a rien de plus énervant que les "les français ont bien compris que", ou "les français ne veulent pas de", ou encore "je parle aux français, ils me disent bien que". Ils devraient arrêter de prendre leurs souhaits pour des réalités.

Dans une moindre mesure reviendra donc le débat sur la portée à donner à ces élections. Alors, finalement, comment doit-on interpréter les résultats ? C'est le moment où, moi aussi, je vais parler au nom des autres. Certains diront que je parle au nom des français, d'autres que je fais de la psychologie de caniveau, mais je vais quand même tenter d'y voir plus clair.

Assurément, cette élection aura en premier lieu des conséquences locales, comme indiqué précédemment. On pourrait donc penser naïvement que les électeurs voteront pour leur potentiel meilleur conseiller général. Ou encore, que leur but sera d'exprimer leurs convictions profondes. Mais en réalité, il n'en est souvent rien.

Si on regarde l'immense majorité des français, celle qui ne fait pas de politique, ne regarde pas les débats sur BFM TV entre personnalités nationales et ne connait du programme des candidats que les clichés habituels sur les différents partis, on peut s'attendre à ce que prévoient les médias : une forte abstention et une dominance des votes de contestation contre les partis au pouvoir, donc avec une forte montée du FN.

Il faut bien savoir que la majorité des électeurs ne connaissent pas leurs élus, à part leur président, leur maire et éventuellement leur député. Ils ne savent donc souvent rien de la politique menée, et sont ainsi d'autant plus influencés par les conversations de café-pmu et les tracts à slogan choc, à l'image de ce que des partis extrêmes peuvent éditer. Et au final, cette attitude n'est dictée que par des enjeux nationaux. Je ne pense pas que les électeurs votent en pensant mettre en garde le gouvernement, mais plutôt qu'ils votent en pensant à ce qu'ils ont entendu dire sur le gouvernement. Ce qui expliquerait que les majorités parlementaires ne remportent presque jamais les élections locales de mi-mandat.

L'élection a donc des enjeux locaux, mais sera influencée par des considérations nationales. Je pense donc que le gouvernement ne doit pas en tenir compte dans leur politique, puisque seules les élections présidentielles et législatives définissent le fond que veut une majorité de français. Seulement, de mauvais résultats devront l'amener à repenser sa communication : arrêt des éléments de langage, ligne politique commune à l'UMP, fin de la critique systématique et parfois fallacieuse des socialistes, recentrage vers des valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité entre les français. A mon goût, ce serait déjà un premier pas pour envisager une reconquête de leur électorat.

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