lundi 21 mars 2011

Démocratie française : l'esprit de République peut-il justifier l'ostracisme des indésirables ?

Les récents sondages de Harris Interactive ont fait ressurgir le spectre d'un 21 avril, avec une forte montée de Marine Le Pen. Selon les spécialistes de statistiques redressées, le Front National persuade de plus en plus de français, et on risque de le voir dans les futures élections. Face à cette tendance, comment réagir : rejet de l'extrême droite ou ménagement de ses candidats ?

Un premier constat s'impose : la fille est perçue comme plus fréquentable que son père : par une partie des français, des électeurs de droite qui pourraient voter pour elle, et des médias qui l'invitent presque tous les jours. Ce constat est étrange à première vue, puisque les idées du FN n'ont pas changé depuis 30 ans, à en croire les cadres du parti et leur site officiel.

Cependant, Marine Le Pen n'a plus la même façon de parler, et elle a visiblement souhaité ne pas commettre les mêmes erreurs que son père. Ainsi, elle ne tient pas de propos négationnistes, ne fait plus d'amalgame entre islam et islamisme, parle de social, de justice et de laïcité. Encore récemment, elle déclarait que la Shoah est le « summum de la barbarie » pour mieux se démarquer de certaines tendances du parti qu’elle préside.

Aujourd'hui, tous les débats politiques s'attachent sa présence : BFM TV pour débattre contre Mélenchon, iTélé, France 2, LCI... Le discours séduit, et fait monter les audiences. Et la ménagère de droite de moins de cinquante ans finit par se laisser persuader que le Front National n'est pas extrême.
Pour répondre à la montée de ce qu'il faut encore appeler l’extrémisme, la stratégie longtemps utilisée a été la diabolisation, la mise au ban de la société et le front républicain. Mais depuis le 21 avril 2002, les stratégies deviennent incohérentes et des divergences apparaissent à gauche comme à droite. Ainsi, Jean-Luc Mélenchon accepte de débattre face à Le Pen quand l'UMP se prononce contre la formation d'un arc républicain, alors même qu’une partie de la gauche appelle à voter pour des candidats de droite pour faire barrage au FN.

Tentons d'y voir plus clair. La plupart des personnalités politiques n'ont pas compris qu'un cap avait été franchi, et qu'elles ne pourraient freiner la montée du FN qu'en combattant sur deux fronts : la proposition et la dénonciation.

Les extrêmes se nourrissent souvent de l'immobilisme des partis de gouvernement et du pessimisme français. De plus en plus, si la vie des gens ne s'améliore pas, ce serait la faute du « tous pourris ». Quand on voit les retournements de vestes des politiques, les promesses non tenues et les actions parfois plus dictées par les lobbies et les intérêts particuliers que par le sens de la nation, on comprend la grogne des ignorants, et même celle des autres. Pour cela, les politiques se doivent de proposer des solutions réelles et des alternatives réalistes, en corrigeant dès maintenant la vision populaire de la politique. Être fidèle à ses engagements devrait déjà être un premier pas.

Je pense que Cécile Duflot a raison lorsqu’elle souligne les désillusions de certains électeurs. Prenez un passant dans la rue, et essayez de lui donner un tract politique ou de lui parler d’élections : vous risquez au mieux d’être ignoré, au pire d’être pris à parti. Les promesses non tenues de Nicolas Sarkozy, mais aussi celles proposées par des partis de gauche qui n’ont ni la capacité, ni la volonté, ni le pouvoir de les mettre en œuvre.

La deuxième solution consiste en la dénonciation systématique du programme du FN. Mais attention, pas les indignations outrées d'une Christine Boutin sur France 3 : il faut montrer aux électeurs l'absurdité et l'extrémisme des propositions du FN. En vrac : le FN est contre l'avortement, pour la peine de mort, contre les couples homosexuels, pour le doublement du nombre d'autoroutes, contre le droit de grève et pour l'uniforme dans les collèges et les lycées. Je suis sûr qu'en rappelant seulement ça aux électeurs, le score de l'extrême droite baisserait de moitié.

Il ne faut pas ostraciser les extrêmes, car ça leur donnerait un prétexte de victimisation. Il faut les affronter de face pour mieux les combattre. Et quand je dis de face, je ne parle pas d'un débat sur la place de l'islam en France. Au contraire, je parle d’aller à l’opposé de ce qu’attendent les Le Pen.

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