dimanche 20 mars 2011

Japon : l'humanitaire international peut-il être financier ?

Alors que le Japon traverse sans doute sa plus grave crise depuis la seconde guerre mondiale, les appels aux dons se multiplient, et partout on voit des images de japonais endeuillés, réfugiés, fuyant le désastre du séisme et du tsunami, ou au contraire cherchant des proches dans les décombres de leur maison. Alors que tout n’est que désolation, notre générosité est appelée à l’aide.

Face à ce drame humanitaire, avec déjà plus de 500 000 personnes déplacées, la communauté internationale se doit de réagir pour aider les japonais. Comme souvent après des catastrophes humanitaires, la première réponse attendue et fournie est financière : pour aider les survivants, il faudrait donc donner de l'argent. Personnellement, je ne vois pas comment donner de l'argent à la 3ème puissance économique mondiale va les aider. Pour moi, ce n'est pas d'argent dont les japonais ont besoin, mais d'aide matérielle.
Les deux catastrophes naturelles ont privé une partie de la population d'eau courante, d'électricité, de gaz, de pétrole, de vivres, de matériel hospitalier. Il y a déjà plusieurs dizaines de milliers de sauveteurs et réparateurs qui s'occupent de reconstruire le pays, mais ça ne suffit pas.

Livrons-nous à un petit exercice de réflexion : imaginez qu'en France, ou là où vous habitez, un séisme suivi d'un tsunami provoquent le chaos dans le pays, jettent des centaines de milliers de personnes dans la rue, et vous privent d'eau, d'électricité, et j'en passe. Préfériez-vous alors recevoir quelques centaines d'euros pour survivre quelques jours, ou voir des personnes compétentes vous aider pour la recherche des survivants, pour la reconstruction de votre maison, pour le rétablissement des lignes électriques ?

Imaginez-vous dans un paysage apocalyptique, avec de la boue à perte de vue, et votre maison en ruine devant vous. La première chose que vous faites est-elle alors de chercher votre carte bancaire dans les décombres, ou de chercher vos proches, de chercher des vivres, de chercher de l’eau et un toit ?

Aujourd'hui, les japonais ont besoin d'aide matérielle et de « main d'œuvre humanitaire » : envoyer des équipes de recherche est plus utile que de l'argent, envoyer des techniciens d'EDF permet des rétablissements de lignes plus rapides, envoyer des vivres est plus urgent que leur donner de quoi s'en acheter.

Au fond, je suis contre toutes les organisations de collecte de fond, pour plusieurs raisons. D'une part, ce ne sont pas les plus efficaces pour organiser l'envoi de matériel, de vivres ou de personnel : une coordination à plus grande échelle est nécessaire pour une meilleure efficacité, et les Etats constituent la meilleure échelle pour une aide humanitaire globale. Ensuite, ces organisations de collecte procèdent souvent par harcèlement, par courrier, téléphone, ou directement dans la rue, ne manquant pas de vous faire culpabiliser à chaque fois qu'elles en ont l'occasion, avec le même cynisme que des employés de pompes funèbres : «je suis sûr que vous voulez le meilleur pour votre père ». Et enfin, ces organisations sont pour la plupart devenues des monstres bureaucratiques, qui engloutissent une part importante des dons dans de la gestion quotidienne de locaux à Paris ou dans les salaires d'employés.

Au final, non seulement vous êtes harcelé, vous culpabilisez et vous donnez, mais en plus jusqu'à la moitié de vos dons ne profitent pas à ce qui est écrit sur l'enveloppe.

Vous me direz, toutes les organisations ne sont pas comme ça, seulement certaines grosses structures américaines ou des micro-associations. Et je suis totalement d'accord avec vous. Je ne prône pas ici la suppression de l'humanitaire associatif, surtout quand je vois le rôle que jouent des associations comme Médecins Sans Frontières, pour ne citer qu'eux. Seulement, je pense que l'utilisation des dons doit être repensée, et que la politique de soutien des pays qui en ont besoin par l'envoi massif d'argent doit à tout prix être évitée. Pour une meilleure efficacité, et contre les tentatives de détournement de fonds de leur but originel.

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